Mary and Max. - [Adam ELLIOT] ou "le film tristement drôle et drôlement triste"

Avec les voix de Philip Seymour Hoffman et Toni Colette, 2009, 1h30
 
Mary and Max. fait partie des séances de cinéma dont je me souviendrai toujours. Et dieu sait qu'ils se comptent par centaines, les films que j'ai vus au cinoche. 
Mais il est des séances, au-delà même du film, qui résonnent éternellement. Un peu comme un livre. La qualité du film y est souvent pour beaucoup. Mais pas seulement. Un état d'esprit, un bouleversement, une personne à mes côtés, une ambiance particulière... je ne me l'explique pas. 

Parmi elles, Mary and Max. 
J'étais seule. Avec un autre type dans la salle, venu sûrement par hasard lui-aussi. Nous étions deux pèlerins dans la salle 17 du Gaumont Pathé, un samedi aprèm pendant que tous les autres étaient sur le dernier blockbuster à la mode. Et nous étions à quelques sièges d'intervalle, sur la même rangée. 
Comme souvent, je suis sortie bouleversée. Il m'a tenu la porte et je me suis dit "Mais que peut bien ressentir cet unique spectateur présent avec moi dans la salle?". Est-il aussi H.S que moi? 

J'ai revu (pour la énième fois) Mary and Max, parce que le Jules était motivé pour voir "de la pâte à modeler". Trop contente de pouvoir (enfin) en parler. Verdict.

Mary est une petite fille australienne solitaire et disgracieuse âgée de 8 ans. Tête de turc des garçons de son école, elle décide d'écrire à un correspondant choisi au hasard dans un annuaire, espérant se faire un ami. Max Horowitz, 44 ans, juif solitaire, obèse et atteint du syndrome d'Asperger, répond à sa lettre. Ils deviennent ainsi de grands amis pour les années qui vont suivre...

Exit les gosses.

Qu'on se le dise très clairement, Mary and Max n'est pas un énième film d'animation pour les chiards. Il n'en est rien. Ne tentez pas le coup, car votre progéniture risquerait de vous poser tout un tas de questions après, notamment sur l'alcoolisme, l'homosexualité, l'acte sexuel, l'autisme, la solitude, l'agoraphobie, la religion, l'obésité, le suicide... bref pas la grande joie. Collez-le plutôt devant les Minions et visionnez ce film avec un paquet de mouchoirs pas trop loin...

La solitude comme point de départ et d'arrivée

Vous l'aurez compris en lisant le pitch, le thème principal de ce film est la solitude, ses causes et ses conséquences. La solitude parce qu'on a "une tache couleur caca" sur le front, la solitude parce qu'on est atteint du mystérieux syndrome d'Asperger, la solitude parce que nos parents ont démissionné et parce que, tout simplement, on n'a pas d'amis. 
On n'a pas d'amis. Cette phrase, si on prend le temps d'en saisir véritablement la portée, est terrifiante. Mary a 8 ans, l'âge de l'innocence et des fous rires, et elle n'a pas d'amis. Alors le hasard d'une adresse l'amène à correspondre avec Max, autiste, obèse et seul lui aussi, qui vit à l'autre bout du monde. 

Pas d'interaction mais pas d'ennui

Le film est en grande partie épistolaire: on ne voit que très très rarement Mary parler, et je crois que Max ne prononce pas un mot. Seules leurs lettres sont lues. En arrière-fond, le narrateur (l'excellent Denis Podalydès!) nous raconte l'histoire de ces deux personnages attachants. Sinon, place est laissée aux images, souvent larmoyantes ou touchantes, très descriptives (on est plus sur des plans simples que sur de véritables scènes) et à la bande-son absolument magnifique (Penguin Orchestra). Les personnages sont présentés par leurs habitudes et leurs manies, mais personne n’interagit avec personne. Et ouais. Vous verrez très peu de plans où les personnages sont ensemble. Fort hein?

Une esthétique enfantine pour un film d'adulte

Avec les visages arrondis, les mains à 4 doigts toutes potelées, ce film fait clairement penser à Chicken Run. Sauf qu'il suffit de 5 minutes pour réaliser qu'on en est à des millénaires! 
Les États-Unis de Max sont colorisés dans un noir et blanc très austère. C'est la pollution, la foule, les gens étranges, les buildings, les voitures. 
L'Australie de Mary est colorisée dans un joli ton sépia, plus doux, plus enfantin, comme un souvenir. C'est le petit village, les voisins, les animaux, la proximité. 
Une façon différente d'être seul...
Les rares notes de couleur sont le pompon de Max et la barrette de Mary, rouge vif, comme un rappel entre les deux héros, et la bague de Mary, qui change selon ses humeurs (j'en voulais TROP une quand j'étais petite). 

C'est sordidement... mignon

Les deux univers sont très joliment dépeints. Mais tout est... sordide. Les moments évoqués dans les lettres et par le narrateur sont à chaque fois très émouvants (les larmes de Mary envoyés dans une fiole à son ami qui ne peut pas pleurer, bah moi ça m'a fait pleurer).  Le plus souvent, on esquisse un sourire en ayant les yeux humides... Car la magie de ce film, c'est ça: nous faire sourire avec des choses tristes et nous émouvoir avec des choses rigolotes...
Tout est tristement drôle et drôlement triste. On tomberait presque dans le misérabilisme tant le sort s'acharne sur Mary, a qui tout et rien n'arrive jamais. Sa mère alcoolique, son père taxidermiste, son mari finalement homosexuel... elle cumule à 8 ans les aléas de 10 vies! Pendant ce temps, Max reste seul chez lui et ne sort que rarement. Il n'a pas de vie; il ne peut pas en avoir.


Je ne peux que vous HURLER par écrit avec PLEIN DE MAJUSCULES de VOIR ce film. Trouvez-le, par tous les moyens, et préparez-vous: ce n'est pas un film drôle, et pourtant vous rirez (entre deux reniflements); cela ne parle pas et pourtant vous ne vous ennuierez jamais. C'est une histoire d'amitié à longue distance, magnifique prétexte pour nous présenter la (triste) vie de deux personnages un peu choisis par hasard. Personnellement, Mary et Max restent depuis 2009 deux personnages aussi attachants qu'émouvants, que je garde précieusement au fond de moi.

 Mes p'tites étoiles:

Mais, tout cela n'est que mon humble avis. 


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