Blablabla [04] - Mais c'est quoi un "classique", nom d'une pipe ?


A travers les discussions, les chroniques littéraires, les émissions télé... deux grandes catégories de romans semblent se dessiner: les romans contemporains, opposés aux romans dits classiques.
Je me suis donc posée une question toute simple: quand est-ce qu'un livre rentre dans la seconde catégorie? Quelle en est la définition exacte?Quelle est la part d'objectivité dans cette catégorisation?
Je vais essayer d'apporter quelques (très) humbles éléments de réflexions, sortis de mon hémisphère droit mais aussi de quelques recherches Internet (car Google est mon meilleur ami).


D'emblée, il apparaît que le terme classique est polysémique. On est déjà pas dans la mouise. Parle-t-on de classique par rapport à une époque? Par rapport à un succès? Par rapport à une postérité de l'auteur?

Le classique en tant qu’œuvre écrite par des auteurs d'une certaine période

C'est la définition la plus simple.
Oui, mais quelle période? Historiquement, la période classique fait plutôt référence au XVIIème siècle (merci le concours de professeur des écoles!). Il y a eu l'architecture, la musique et aussi la littérature. Il s'agirait là plutôt de "classicisme", période où l'Homme est en recherche de perfection, se dote d'un idéal de raison. On est donc dans une objectivité plus certaine: le livre appartient à une époque historique, c'est indéniable et facile à situer. De plus, il s'agit d'un style, d'un genre, en opposition par exemple avec le romantisme ou le baroque. Mais, cette définition est extrêmement réductrice par rapport au sujet qui nous intéresse... 

Le classique, un chef d’œuvre?

Qui ne s'est jamais écrié en fermant un livre "mais quel chef d’œuvre!" ?

A mon sens la différence entre le chef d’œuvre et le classique se trouve dans la temporalité
Un livre, un film, un album de musique peuvent être considérés à leur réception comme des chefs d’œuvres, de part leur qualité, leur aboutissement, le travail de l'auteur, en gros par la perfection de l'ensemble.

Prenons un exemple récent. Au revoir là-haut de Lemaître pourrait aujourd'hui, en 2017, être considéré comme un chef d’œuvre. Il  a de plus reçu le prestigieux prix Goncourt, ce qui lui donne une légitimité institutionnelle (ce qui est très discutable, n'est-ce pas?) Mais seul le temps nous dira s'il devient un "classique". Car le classique fait plus référence à la durabilité de l’œuvre dans le temps. Le classique intègre peu à peu une culture, un patrimoine, voire l'Histoire d'un pays (en tant qu'objet politique par exemple, je pense à Zola ou à Hugo). Il devient une tradition. 

Mais je ne sais pas si un classique est forcément un chef d’œuvre, et vice versa. 
Car, fait non négligeable, il y a l'étude de ladite œuvre à l’École (du collège à la fac). Peut-être qu'au fond seule l’École est capable de faire d'une œuvre ou d'un chef d’œuvre un classique, qui sera proposé au programme puis enseigné sur le long terme par les profs de lettres et de français. Quoi d'autre que l'enseignement pour faire perdurer une œuvre dans le temps? On se situe dans la transmission d'un patrimoine, dont pour le plus grand nombre seule l'école peut se charger. Il y a peut-être là (mais c'est un autre débat) une (sordide) histoire de politique dont il faut tenir compte (enfin la question se pose surtout pour les programmes d'Histoire).

Le classique en tant qu’œuvre de référence

Cette fameuse œuvre de référence, c'est  celle qui suscite l'admiration, qui est reconnue comme un livre d'une indéniable et qualité. Quid des critères? Quid de l'objectivité? Quid de l'époque? Quid de la personnalité/l'âge du lecteur?

Qui "prétend" que ce roman est classique? L'école? Les historiens? Les autres auteurs? Les lecteurs? Les institutions? Le temps? Surtout qu'on sait bien que certains ouvrages ont été très critiqués voire censurés à leur parution et sont désormais unanimement reconnus comme des chefs d’œuvres. 

Et puis entre Pierre, Paul et Jacques, les classiques vont-ils différer? Faut-il que ce soit une œuvre de référence pour soi ou pour la majorité ?

Pour ma part, je n'ai pas de formation littéraire mais j'ai toujours beaucoup aimé étudier le français puis les lettres au collège et lycée. Aujourd'hui, je suis une grande lectrice. Mais, comme vous avez pu le constater dans cet article, j'ai toujours eu beaucoup de mal avec les "classiques". Je ne suis pas trop bête, pas trop inculte, j'ai des facilités à lire vite... Et pourtant, j'ai vomi Zola ou Balzac. 

Je me demande donc quelle est la part d'universalisme là-dedans? Il y aurait tant de facteurs à prendre en compte, comme la culture d'un peuple, la langue, l'époque où le livre a été écrit, la "mode" dont les critères évoluent beaucoup... Après tout, c'est le gouvernement qui décide des programmes scolaires... Les fameux tops qu'on voit partout dans les bouquins et sur internet "Les 100 livres qu'il faut avoir lus", "100 livres à lire avant de mourir"... Sinon quoi, les gars? J'ai raté ma vie? Je suis une inculte indigne des maîtres du monde sortis d'Hypokhâgne? La question qui se pose alors est: pourquoi lit-on? Pour soi (son divertissement, ses recherches, sa construction personnelle...) ou pour intégrer une sorte de communauté de lecteurs qui ont FORCEMENT adoré Balzac et Proust et qui dissertent des heures pour un prof?

L'enseignement des classiques: une évolution nécessaire?

Est-ce toujours pertinent d'étudier telle ou telle œuvre? Les élèves sont-ils en mesure de recevoir ces œuvres à leur juste valeur ou en tout cas, à leur juste message? 
Qui n'a pas déjà dit ou entendu "L'école m'a dégouté de la littérature?"... L'étude d'un roman dit classique implique souvent la nécessité d'une certaine maturité, d'une certaine culture de base, pour saisir les tenants et les aboutissants d'une œuvre. 
Quel gamin lambda de 16 ans peut prétendre avoir saisi Zola ou Flaubert? Est-ce un grand gâchis ou une nécessité dont les institutions peinent à s'affranchir? Faut-il insister pour faire ingurgiter des œuvres assez rébarbatives dans l'ensemble, quitte à éloigner (souvent définitivement) des jeunes de la littérature?  La liste des classiques peut-elle (doit-elle) évoluer pour s'adapter à son époque? 

J'ai bien envie d'écrire un autre blablabla là-dessus, tiens. 

 J'ai l'impression d'avoir posé plus de questions que trouvé de réponses... Le sujet est difficile, large, et résonne aussi de façon très personnelle en chacun de nous, selon nos accointances, notre passé scolaire, nos études, nos valeurs... Je serais ravie d'avoir vos avis, chers 6 ou 7 lecteurs.

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