Blablabla [02] "Nan mais le livre était carrément mieux que le film"... Et si on en parlait?



Mes fidèles 6 ou 7 lecteurs, assidus, amoureux de mon travail tellement, tellement important, auront certainement remarqué que je m'interrogeais régulièrement sur la pertinence de la mise en relation du cinéma et de la littérature. Alors j'ai décidé de retourner au lycée et de pondre une dissertation sur ça. N'oubliez surtout pas que ce n'est que mon humble avis (et que je serais ravie d'en blablater avec vous a posteriori).

 Aujourd'hui, on a l'impression qu'un scénario sur deux (ciné et série confondus) est tiré d'une œuvre littéraire. Et, normal, j'ai envie de dire, vu la qualité de bon nombre de livres et vu les ressources de notre patrimoine (plus ou moins ancien) mondial. 

Mais... Faut-il nécessairement "comparer" une œuvre littéraire et une œuvre cinématographique?

Le cinéma est un art du visuel, de l'image, du son. L’œuvre littéraire, quant à elle, est l’œuvre de l'écrit, de l'intime, de l'introspectif (joli poncif, hein?). Alors qu'un film n'a qu'entre 1h30 et 2h30 (saga exceptée) pour nous proposer une histoire digne d'intérêt, le livre n'a aucune limite. Les ressources de la littérature sont illimités puisque c'est le lecteur qui fait tout son cheminement, son travail de représentation mentale, d'imagination. Le nombre de pages, on s'en fiche. Le nombre de personnages ou de péripéties, pareil. Tout est possible, acceptable, tant que c'est de qualité. 

Adapter un livre, c'est souvent tenter de faire rentrer dans un coffre de voiture le contenu d'un coffre de camion. On doit nécessairement retirer tout plein de choses, en l'occurrence ce qui est "accessoire" à la compréhension. 
C'est un fait qu'il faut, à mon sens, comprendre dans un premier temps, et accepter dans un second temps. Les lecteurs d'un livre adapté à l'écran devraient se montrer plus tolérants. Qu'est-ce que j'ai pu moi-même dire et entendre dire "Pffff le livre était tellement mieux". Mais, si on mettait de côté juste quelques minutes le bouquin pour réfléchir un peu au parti pris du réalisateur, du scénariste? Comment s'en sont-il sortis? Oui, le pari est souvent risqué. Mais si on utilisait l'adjectif "différent" plutôt que "mieux"? On est souvent obligé de supprimer des personnages, des péripéties, des "scènes", des dialogues... Pas le choix, le réalisateur est limité dans le temps. Et puis, ne parlons pas de toutes les introspections des personnages, leurs questionnements, leur sensibilité... Ce n'est pas possible de retranscrire ça à l'écran, je ne vous apprends rien.
Prenons-en notre parti.

Adapter 600 pages à l'écran, c'est parfois suicidaire, il faut le reconnaître. Mais ça peut aussi donner de bons films non? Je prends l'exemple le plus connu de nos jours et qui parlera à tous: la saga Harry Potter. OUI, les livres sont "mieux", où plutôt devrait-on dire "différents". Clairement. Le frère de Dumbledore? Aux oubliettes. Hermione et la révolte des elfes de maison? A la trappe. Et alors? Les fans du livre que vous êtes (et que je suis!) sont, si je ne m'abuse, également fans des films, en témoignent les Funko Pop dans vos bibliothèques. Parce que, même s'ils sont différents, les films restent absolument géniaux. La différence ne se fait pas nécessairement en termes de qualité, mais plutôt en terme de contenu.
Et je pense qu'on peut dire la même chose de Games of throne ou du Seigneur des Anneaux. Moins complets, forcément (vous avez vu les PAVES?) mais... vu le succès de l'un ou de l'autre, on doit accepter de dire que ce sont des œuvres de grande qualité. N'en déplaise aux détracteurs de celles-ci, que je trouve souvent assez snobs et fermés d'esprit (euh, je me fais des ennemis là ou pas?). Le support est différent, acceptez-le

J'essaie toujours de me poser la question suivante: Si je n'avais pas lu le livre, que penserai-je du film en tant que tel? En tant que simple objet cinématographique sans inspiration littéraire? Sans comparatif? Si la réponse est "le film serait bon", voire "génial", et bah... le pari est réussi non? 
Je n'ai pas lu les GOT et je trouve juste que cette série est l'une des plus réussies de tous les temps. CQFD: malgré la suppression de personnages, de passages des livres ou de péripéties et en dépit de tout ce que pensent les inconditionnels de G.R. Martin... on kiffe (quasi tous) la vibe.

Vous saviez, vous, que le sublime Sur la route de Madison, l'incroyable Forrest Gump, le déjanté Fight Club, le flippant Alien, le génial Le cercle des poètes disparus étaient des bouquins? Ce sont tous des films cultes ET adaptés de livres... Et toc, dans ta face. (pour ma part, en faisant mes recherches, j'ai appris trop de trucs...)

Mais... les inconditionnels de la littérature ne sont-ils pas... juste chiants?

Les littéraires sont-ils des puristes? Un peu trop snobs parfois? C'est tellement classe de dire "Bon bah, le livre est carrément mieux, parce que tu vois... blablabla". Nan mais oui les gars, de toute façon, le cinéma ça vaut moins que la littérature. Nous, les littéraires, on fournit un vrai effort intellectuel, plutôt que de rester passifs devant un blockbuster à 12€50 la place (sans la 3D, WTF?). Il y a ce petit côté présomptueux, genre je pète plus haut que mon séant parce que moi je lis tu vois.

Pardon, mais qu'est-ce que je peux mépriser (ouais, je me fais des ennemis là c'est clair) ceux qui dénigrent le support audiovisuel. Nan, les blockbusters ne sont pas fait QUE pour les abrutis ou les illettrés (bon, ça n'empêche qu'on a plus de chance de trouver un illettré dans une salle Pathé que dans une salle d'art et d'essais). On n'a juste parfois pas envie de se prendre la tête et d'en prendre plein les mirettes. Débrancher le cerveau, prendre du bon temps. On a juste envie de savoir ce que ça donnerait à l'écran. OUAIS bon d'accord, parfois ça donne des bouses infâmes comme le dernier Twilight (et je suis sympa avec le reste de la saga) ou 50 nuances de Grey. Mais moi je suis désolée, j'ai passé un excellent moment devant le Labyrinthe ou la 5ème vague. C'est pas du "grand" cinéma, mais c'est du très bon divertissement. On peut dire que le contrat est rempli.

Il est vrai que la frustration pour le lecteur peut être grande, lorsqu'il voit que l'équipe du film a zappé des chapitres entiers, ou un personnage sympathique... J'en conviens parfaitement et j'ai été la première frustrée devant certaines adaptations, comme "Une vie entre deux océans", "L'homme qui n'aimait pas les femmes", "Au-revoir là haut"). Les films ne sont pas mauvais, mais oui, forcément, il manque des choses. Il y a comme un "deuil" du livre à faire, lorsque celui-ci est livré en pâture à une équipe puis à un public entier (qui parfois ne se doute même pas que c'est tiré d'un bouquin...).

Pour ma part, je me rappelle que j'avais été extrêmement marquée par la scène finale du film "Le parfum" (un de mes livres préférés). Cette orgie de paysans nus et transpirants ensorcelés par le parfum de Grenouille... Cette scène, je crois qu'elle était totalement inadaptable. Dans le livre, ça passait tout seul, forcément, j'étais seule avec moi-même, avec mes représentations à moi. Au ciné, j'avais été assez choquée, je trouvais ça aberrant, "trop gros", complètement fou. Le film était vraiment bon, pour le reste. 

Certains ont l'impression de se faire "voler" leurs représentations initiales. C'est bien normal, mais c'est le jeu ma pauvre Lucette. Tiens, je le voyais plutôt blond et grand ce personnage-là. Oh, la maison je la voyais au milieu d'un champ. Ok, bah là on se trouve face aux représentations du réalisateur, alors pourquoi ne pas les respecter pour ce qu'elles sont? On continuera à rêver dans notre lit en espérant pouvoir oublier ce qu'on aurait préféré ne pas voir. 

Mais... le mode de narration du cinéma permet-il d'adapter n'importe quelle œuvre écrite?

Les littéraires dans l'âme un peu pédants diraient que tous les genres de livres ne se valent pas. Moi je pense simplement qu'il y en a pour tous les goûts, toutes les personnalités, toutes les périodes de la vie.

Il y a d'abord cette "paralittérature". Une sorte de pan de la littérature assez récent qui plait au plus grand nombre. Vous voyez de quoi je parle? J'évoque par exemple ces grandes sagas, ces bouquins qui parlent de vampires ou de mondes parallèles, où l'action prime sur l'introspectif et la langue. Polars, thrillers, romans youg adult, new adult...  Ces romans sont déjà ultra "scénarisés" en tant que tels. Pas ou peu de digressions littéraires, de descriptions longues, de portraits détaillés... On n'a pas vraiment le temps pour ça. On est dans une histoire, on suit des aventures, des péripéties.
Il apparaît que c'est de la matière première en or brut pour qui veut réaliser un film ou écrire un scénario. Le travail est déjà mâché, si je puis dire. Quasiment clé en main! On supprime deux trois merdouilles susceptibles de rallonger le film et hop, bienvenue à Twilight, Hunger Games, Les âmes vagabondes, Divergente, 50 nuances de Grey, Sublimes créatures.... Et la liste est looooonnnngue comme mon bras. Sans oublier bien sûr également tous ces thrillers ou polars adaptés à l'écran (Millenium, Les enquêtes du département V, Gone Girl...).

Ces livres sont écrits pour les lecteurs qui justement, veulent peut-être, inconsciemment, retrouver la sensation du cinéma (et c'est assez générationnel aussi). Ce ne sont pour moi pas des véritables Ecrivains qui écrivent, plutôt des excellents conteurs d'histoires. Le genre de livre qu'on dévore en 3 soirs parce que ce sont de véritables page turner. Pas de longueurs, l'essentiel, les péripéties, l'action. On a juste le travail d'imagination à fournir. C'est pour cette raison que j'aime appeler ça la "paralittérature". Ce n'est pas de la sous-littérature, non; simplement un genre à part.

A côté, il y a la littérature classique ou contemporaine, mais où les auteurs (pardon d'avance) ont un véritable talent pour l'Ecriture, avec un E majuscule. Ces livres qu'on savoure plus qu'on ne dévore (même si on peut dévorer aussi, hein). Ces livres plus complexes, plus longs à lire, à comprendre, ces livres qui ont un fond ET une forme. Une histoire ET un style.
Ces livres dont les adaptations seront vues par des lecteurs souvent plus exigeants que les lecteurs de Twilight. Ces livres qui rendent le pari de l'adaptation plus risqué.

Bon, ceci dit, ça a beau être risqué, on compte quand même de sacrées belles réussites: Le nom de la Rose, Shutter Island, La planète des singes, La ligne verte, La liste de Shindler, Le Pianiste... Quand j'y pense, c'est à cela qu'on reconnaît un fucking good réalisateur, non? Les titres énumérés au fil de cette chronique appartiennent juste aux filmographies des plus grands: Polanski, Spielberg, Scorcese, Eastwood, Fincher... C'est aussi une donnée à prendre en compte. Qui va se charger de transformer des mots en images?

Mais... en gros, comment on conclut?

Si vous allez sur cette page, vous vous apercevrez que WHAOU, des adaptations de livres réussies, y en a des dizaines et des dizaines. Classique, thriller, contemporain... tous genres confondus!

A mon humble avis, on pourrait partager notre point de vue en deux: l'avis sur le film en tant qu’œuvre cinématographique et l'avis sur l'adaptation du livre. Tout en n'oubliant pas que le coffre d'une voiture est carrément plus étroit que celui d'un camion...
Ce serait peut-être plus juste, non? 


Commentaires

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...